Épinay-sur-Seine : la droite unie, du Modem au Front National

Par Pierre Franklin Tavares|25 mai 2013|Ma ville : Épinay 93

Comment ne pas s’interroger sur un fait étrange ? En effet, depuis onze ans maintenant, à Épinay-sur-Seine, le Front National a « disparu » de toutes les élections à caractère local, excepté les Cantonales de 2011. Ce fait oblige à la question suivante : pourquoi ce parti ne trouve-t-il pas de raison suffisante à prendre part au suffrage local, dans une ville moyenne traversée par une grave crise urbaine qui offre un terreau à son discours ? Là, plus qu’ailleurs, le Front National est « timide ». Pour aller plus avant dans l’analyse de cette discrétion, commençons par établir quelques faits indubitables.

Premier constat : selon le type d’élections, le Front National opère dans notre ville une présence sélective. En effet, avant 2001, le Front National était de tous les scrutins. Mais depuis cette date, on ne le voit mobilisé à Épinay qu’à l’occasion des Législatives, des Présidentielles, des Régionales, des Européennes, et jamais lors des Municipales. Pourquoi donc ?
Deuxième constat : selon le découpage administratif et territorial, Épinay-sur-Seine a un double statut, puisque la ville est à la fois une Commune et un Canton. Paris a également le bénéfice d’un double statut : Ville et Département. En tous les cas, il convient de retenir ici que, pour Épinay-sur-Seine, c’est le même corps électoral qui est convoqué lors des Municipales et des Cantonales. Cette précision a son importance, car elle met en évidence le fait que, lors de ces deux élections, nous avons une seule et même carte électorale avec le même personnel politique local.
Troisième constat : bien curieusement, ce n’est que lorsque Hervé Chevreau, le maire actuel, est candidat aux Municipales que le Front National ne présente pas de candidat. En effet, comment comprendre que lors des élections cantonales, où le scrutin est « uninominal » (un seul candidat), le Front National est systématiquement présent, là où un rapide « calcul politicien » devrait plutôt le conduire à préférer le scrutin de liste (plurinominal), en l’occurrence les Municipales, afin d’obtenir trois voire quatre élus ? Pourquoi le Front National joue-t-il donc contre lui-même ? Peut-être quelques-uns parmi les plus anciens s’en rappellent, il y a quelques années avait circulé l’information stupéfiante selon laquelle, à Épinay, les candidatures Front National étaient tantôt suscitées tantôt par la droite locale, tantôt par la gauche locale. Nul ne peut décemment croire en une telle « propagande » qui accréditerait l’image d’un personnel politique local totalement cynique. Mais si jamais cela s’avérait exact, alors le mot grec « cynique » revêtirait tout son sens.

Après cette courte digression, reprenons le fil de nos questions. L’absence chronique du Front National aux élections municipales est-elle fortuite ? Il est enseigné, en philosophie, que trois faits qui coïncident ne sont plus « accidentels » ou encore que si le même fait se répète, il n’est plus le produit du « hasard », mais relève du « nécessaire ». Ainsi, le triple constat qui vient d’être fait et l’idée philosophique mentionnée instruisent, à juste titre, la question qui suit : l’absence permanente du Front National aux seules élections municipales est-elle une simple coïncidence ou la conséquence d’un accord local ? Dans le premier cas de figure, il est « accidentel », dans le second, il est « nécessaire », c’est-à-dire, en l’espèce, volontaire et relève d’un accord entre partis politiques.

La réponse n’est pas contenue dans la question, mais elle réside dans les faits. Point n’est donc besoin d’être grand clerc, pour déduire l’idée d’un accord local tacite ou implicite entre la majorité municipale actuelle et le Front National local. Certes, c’est le droit de ces deux forces politiques de passer alliance. Mais alors, pourquoi le taire et le dissimuler ? L’accord est-il honteux ou est-il compromettant pour la droite locale si cela se dévoilait exact ?

On l’aura aisément compris, l’alliance de toutes les droites locales ne repose pas sur une base éthique. Si tel était le cas, la majorité de la droite municipale n’éprouverait aucune gêne politique à le montrer. En chaque homme politique ou en chaque groupe politique, et ce quelle que soit son évolution, il reste toujours une trace des convictions d’origine. À Épinay-sur-Seine, et à droite tout particulièrement, l’éthique et le politique sont en conflit, tant au niveau des principes qu’au plan pratique. Force est de constater une « alliance objective » entre la droite et l’extrême-droite locales. Cachez-moi donc cette alliance honteuse que le corps électoral ne saurait voir et qui ne peut se concevoir que dans l’obscur des rencontres et le sombre des calculs.

Dussé-je le répéter, un clan sans « vertu », dont le socle est le Mouvement pour la France (MPF) de Philippe de Villiers , dirige cette ville. Au demeurant, tous les élus de droite ne sont pas informés de la « compromission » que leurs leaders ont avec le Front National. Et les intéressés se gardent bien de le leur faire comprendre. Car plus d’un s’en offusqueraient. Tout doit rester caché.  Comment certains élus issus de l’UMP et de l’UDI peuvent-ils accepter et cautionner une alliance aussi honteuse d’un partisan de Borloo et du Front National ?
La droite à Épinay, c’est une addition simple : MODEM +UDI + UMP + FN.

L’un des enjeux principaux des Municipales 2014 sera de clarifier le jeu local, par une gauche rassemblée et qui devra mettre un terme à la « mascarade » qui dirige cette ville où, pour un strapontin et des menus avantages, quelques-uns ont renoncé à la République. Épinay est à présent un assemblage chaotique de communautés. Épinay n’appartient pas seulement à une Communauté de communes (Plaine Commune), mais Épinay est par ailleurs devenue une « Commune de communautés ». Et la Municipalité ressemble à une sorte de « guichet unique » où chaque communauté fait valoir des « droits », au détriment de la République.

Bientôt les déguisements devront tomber. Il incombera alors à la gauche locale de rebâtir, pierre après pierre, principe sur principe, quartier avec quartier, hommes et femmes libres, la République « une et indivisible » selon ce qui la fonde à l’échelle d’une ville. Et cela aura valeur d’exemple nationale, contre toutes les alliances hybrides et hétéroclites que plus d’un essaient d’expérimenter ici et là.

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